On a des paysages dans les yeux.
Ils sont là, imprimés. Au bout d'un moment, ils passent derrière, dans une zone indéfinie, une mémoire spéciale, rien que pour eux. Tout dépend de l'œil touché, atteint, capté et capteur.
Photo C. Destandau
D'abord, le dessin, l'ourlet de la paupière, les cils et le petit grain de beauté bien centré. Puis dans l'iris, au milieu de toutes ces courbes, l'encadrement de la fenêtre et le paysage contenu. Ce ne peut être que le reflet. On a envie d'y voir le décor que voit l'œil. Mais l'œil fixe le photographe et le photographe n'est pas un paysage. Quoique...
Maintenant dans nos yeux, l'œil et le paysage. Mise en abyme que vous perpétuerez.
Plus difficile avec l'image ci-dessous que le modèle de la première photo - celle au grain de beauté - me supplie de faire figurer dans ce billet. " Mais si, il l'a, le paysage dans l'œil ! ".Il s'agit de l'œil d'un très bon ami du sus-dit modèle : voici donc " le paysage dans l'œil d'Anakin " [Mission accomplie]
Les paysages, pourtant statiques, deviennent voyageurs. Exposés, montrés, vus, ils passent d'œil en œil et vont aussi dans la mémoire de qui les voient. Ils en ont du travail, ces paysages !
Et, j'ignore pourquoi, comme un paysage ancien, me vient cette phrase de Joël VERNET :
[...] Écrire ne vaut que pour le chant de la vie invisible, engluée dans la terre, mise sous le boisseau. Écrire délivre peut-être de telles voix. C'est sans doute cela l'espérance d'écrire : ouvrir vers l'infini, vers l'impossible, vers l'inconnu, entendre battre le cœur des silhouettes. (les italiques sont voulues par l'auteur)
in Celle qui n'a pas les mots - Éd. Lettres Vives (Entre 4 yeux)